Dimanche 30 août 2020. On pourrait dire platement : « Il fait un temps de rentrée ». Le vent pousse les coques de marrons encore vertes qui gisent au sol. Leurs piquants tendus ne sont pas engageants. Dans les maisons, les placards sont sens dessus dessous d’avoir cherché des vêtements chauds, des écharpes et des chaussures fermées.
Ceux qui sont en tee-shirt grelottent
Dehors, les passants portent un masque, un blouson, le regard de qui a remisé ses vacances aux oubliettes et le front plissé se demandant « à quel métro descendre, que dire au patron pour justifier son retard, est-ce que j’ai bien payé mes impôts ? Mais quand sont les prochaines vacances ? Il me reste combien de jours, d’ailleurs ? » Ceux qui sont en tee-shirt et tongs grelottent. Paris ne s’est pas encore complètement remplie mais ses ondes lourdes précèdent déjà le retour de ses habitants pressés. Sur les tables judicieusement inclinées s’égouttent des restants de pluie. Les boutiques qui ont mis la clé sous la porte sont masquées de pans de bois. Ils sont taggués.
Une bière, une gare, des illusions
Demain les profs reprennent. Dans deux jours, ce sera le tour des enfants. Face à la gare, les valises alternent avec les gros sacs à dos colorés. On se presse, juste pour cinq minutes, dans le bar.
L’été est remballé
La dernière bière avant de partir prolongera l’illusion des vacances. Enfin, c’est ce qu’on croit. Seul le patron qui vous sert, mi-nonchalant mi-dynamique, l’œil pas très vif mais qui voit tout, taiseux et sachant, a bien saisi, lui, que l’été est remballé. Rendez-vous l’année prochaine, pense-t-il sans même s’en rendre compte, une main posée sur sa hanche couverte d’un long tablier blanc, le regard dans le vide, lors d’une courte pause entre deux clients.