(in italiano dopo le foto)
Je rencontre Eve dans la maison de la rue Lepic, où elle habite avec une amie commune. J’ai toujours été fascinée par le chaos ordonné qui règne dans sa chambre : partout des livres, des photos, des objets achetés au cours de ses innombrables voyages. Sa fenêtre donne sur un bar-tabac du début du siècle, au-dessus des toits, le soir, on aperçoit la lune. Parfois des ombres surgissent des fenêtres des maisons d’en face : des tranches de vie éphémères qui nous attirent mais la pudeur nous fait détourner le regard pour ne pas s’immiscer dans la vie des autres.
Sa façon de bouger et de s’habiller est belle : pantalons confortables à ourlet évasé, chaussures fermées ou bottines amphibies, écharpes et vestes à la chinoise : mélange de styles et de couleurs. Elle a toujours porté ses cheveux au carré, une Valentina de Crepax aux mèches argentées, mais toujours avec un regard curieux et lumineux. Je lui demande depuis un moment de me raconter quelque chose sur sa vie, je sais qu’elle a été bien remplie et aventureuse mais sa réticence l’a toujours fait hausser les épaules : elle se sent comme une femme ordinaire et n’aime pas parler d’elle. Aujourd’hui, devant un téléphone qui enregistrait ses paroles, elle s’est un peu livrée en disant :
Eve:
Je suis née dans une petite ville d’Auvergne, mes parents sont venus à Paris dès mes un an – j’ai fait mes premiers pas sur les marches de la Sorbonne, face au petit hôtel qu’ils habitaient. Plus tard, j’ai vécu entre Paris et le sud de la France, j’ai étudié et fait mille métiers : créer des vêtements, peindre la soie … puis du secrétariat, de la figuration, j’ai même fait coursier et ouvreuse de cinéma, et bossé l’été dans une pizzeria.
Après avoir étudié la photographie pendant un certain temps, j’ai travaillé dans une agence de publicité pleine de créatifs, vous pouviez créer n’importe quoi, c’était une ruche d’esprits brillants au travail. Après un an dans la publicité, je suis allée avec mon conjoint de l’époque en Suisse où j’ai appris la photo de studio, puis décidé de repartir.
J’aime voyager, rencontrer les gens, j’ai toujours été partout pour apprendre quelque chose de nouveau, mais l’un des voyages qui m’a le plus marqué a été ma vie à New York dans les années 80, je me souviens de nombreuses rencontres intéressantes dans des bars, où j’ai partagé café et bières avec la crème de l’intelligence artistique de l’époque. J’ai pris beaucoup de photos, mais c’est surtout là que j’ai abordé l’iconographie. Aux États-Unis, j’étais au milieu du théâtre, du cinéma, des spectacles, de la danse contemporaine. J’ai fréquenté un groupe où je me suis retrouvée avec des cinéastes, des acteurs et des danseurs, des animateurs. C’est là que j’ai découvert ma passion pour la photographie, la mienne, mais surtout, celles des grands photographes du New York de cette période.
Quand je suis rentrée à Paris j’avais ni partenaire, ni argent, ni maison, j’ai téléphoné à un ami pour demander du travail, « n’importe quoi », et j’ai commencé – je tapais vite avec seulement quatre doigts! -, à travailler comme secrétaire à “Vogue Hommes ». Ma mission était de corriger puis de taper les textes que les journalistes me remettaient sur des feuilles froissées : ils étaient écrits d’une manière presque pire que celle des médecins, à l’époque il n’y avait pas d’ordinateurs et à partir de ces manuscrits illisibles je déchiffrais leur écriture. Heureusement, j’ai réussi, j’avais un œil formé à la graphologie que j’avais étudiée quelque temps auparavant. Plus tard, mes collègues ont découvert que j’étais photographe et ils m’ont confié d’autres tâches, de petits reportages dans des boîtes de nuit, des soirées, des concerts, et là ma « carrière » a commencé. Quand la chef du service photo a décidé de faire un bébé, le directeur artistique m’a proposé de la remplacer durant son congé-maternité. J’ai commencé à travailler comme iconographe dans la presse, puis dans l’édition. Et en free lance pendant 25 ans !
J’ai fait beaucoup de livres avec des photos choisies par moi, je proposais les images accompagnant les textes, ou je partais d’images que j’apportais sur un thème qui me plaisait et suggérais un auteur. Plusieurs d’entre eux sont devenus des amis.
Tout le monde ne sait pas ce qu’est l’iconographie : c’est la recherche, la sélection ou la production d’images, à partir de sources très diverses – agences de presse ou d’art, fonds d’archives, commande à des photographes, interprétation décalée d’un sujet pour l’illustrer de façon originale, capacité à structurer un récit photographique…S’y ajoutent la mise à jour des connaissances juridiques et la négociation des droits; personnellement, j’ai toujours veillé à défendre les photographes, ce que certains de mes clients – très peu -m’ont parfois reproché.
Une fois à la retraite, j’ai recommencé à voyager partout dans le monde : Europe, Asie, Amérique.
L’un des pays qui m’a le plus fasciné est l’Islande, un paysage spectaculaire, j’avais l’impression d’être sur une autre planète.
Quand j’ai pris ma retraite (ou plutôt quand elle m’a prise, car j’aurais volontiers continué ce métier que j’adorais) je suis partie pour un ashram en Inde où j’ai commencé à faire du yoga. J’y ai rencontré des gens du monde entier qui pratiquaient le yoga. C’était quelque chose avec un fort impact, entrer dans une autre atmosphère, se rapprocher des gens sans parler leur langue – c’est-à-dire sans jamais vraiment pouvoir les connaître – donne envie d’en savoir de plus en plus sur les autres, et en même temps on apprend beaucoup sur soi-même.
Là, ils m’ont proposé d’enseigner le français, je ne l’avais jamais fait, mais ils m’ont confié un groupe de petits élèves, je pouvais enseigner la langue librement, de manière non académique, j’ai utilisé des jeux, des chansons et des dessins. Nous avions même un film hebdomadaire, en français ! Il y avait 9 enfants entre 8 et 12 ans et cette période avec eux est l’un des meilleurs souvenirs de ma vie.
Ce que j’ai le plus aimé au fil des années c’est le cinéma, j’ai l’impression que toute mon évolution en a été marquée. Quand j’étais petite, ma mère travaillait et me déposait dans un cinéma à Belleville où je voyais tout le temps des films. J’ai grandi avec le cinéma, il m’accompagnait au quotidien, j’aimais tant de réalisateurs : Antonioni, Visconti, Melville, Jean-Luc Godard, Scorsese, Malick, Jim Jarmush, les grands Asiatiques … il y en a tellement, je ne peux dire quels sont mes préférés sans trahir les autres. « Mon » cinéma est le Studio 28 à Montmartre, à quelques pas de la rue Lepic! Etant jeune, quand j’habitais en banlieue je traversais toute la ville pour y aller, ils projetaient des films d’art et d’essai, c’est un endroit fantastique, avec de grands lustres, des rideaux rouges qui s’ouvrent au début des spectacles, rester dans un fauteuil plongée dans les images est une expérience dont je ne me lasse pas. Un autre type de voyage.
J’espère après la pandémie pouvoir à nouveau partir, mais le plus important pour moi, ma vraie « réussite », ce sont les ami.e.s. Et je veux continuer à chercher et faire des photographies.
Aujourd’hui je continue mon travail d’iconographe sur facebook, j’essaye d’y faire rayonner de la beauté, partageant mon amour des textes et des images. Et j’ai des nouvelles de par le monde, de toutes les « donne con lo zaino « que j’ai rencontrées.
Eve Zheim
Gruppo Lepic: Eve
Incontro Eve nella casa di rue Lepic, dove abita insieme ad una comune amica. Mi ha sempre affascinato il caos ordinato che regna nella sua stanza: dappertutto libri, foto, oggetti comprati nei suoi innumerevoli viaggi. la sua finestra si affaccia su un bar tabacchi di inizio secolo, al di sopra dei tetti, la sera, si scorge la luna. A volte delle ombre appaiono dalle finestre delle case di fronte: spicchi di vita fugaci che ci attraggono ma che il pudore ci fa distogliere gli occhi per non intrometterci nelle altrui vite.
É bello il suo modo di muoversi e di vestire: pantaloni comodi svasati sul fondo, scarpe chiuse o stivaletti anfibi, sciarpe e giacche di tipo cinese: mescola stili e colori. I suoi capelli li porta da sempre a caschetto, una Valentina di Crepax con fili argentati, invecchiata ma sempre con lo sguardo curioso e luminoso. Le chiedo da tempo di raccontarmi qualcosa della sua vita, so che è stata piena e avventurosa ma la sua ritrosia le ha sempre fatto scrollare le spalle: si sente una donna comune e ama poco parlare di sé. Oggi, davanti ad un telefono che registrava le sue parole, si è aperta un poco, raccontando:
Eve:
Sono nata in un piccolo centro nella regione di Auvergne per poi stabilirmi nel sud della Francia dove ho studiato e fatto mille lavori: ho fatto la sarta, colorato la seta, poi la segretaria, la fattorina, la maschera nel cinema, la cameriera in una pizzeria, la comparsa. Dopo aver studiato un po’ Fotografia, ho lavorato presso un’agenzia pubblicitaria piena di persone creative, si poteva creare di tutto, era un pulsare di menti brillanti all’opera. Dopo un anno nella pubblicità sono partita con il mio compagno di allora per la Svizzera per poi decidere di partire ancora una volta.
Adoro viaggiare, fare tanti incontri, sono stata ovunque imparando sempre qualcosa di nuovo, ma uno dei viaggi che ha segnato di più la mia esistenza è stato quello a New York negli anni ’80, ricordo tanti incontri interessanti nei bar, dove condividevo caffè e birre con la la crema dell’intelligenza artistica di quel periodo. Ho scattato tante foto, ma soprattutto, è lì che mi sono avvicinata all’iconografia. Negli Usa ero in mezzo al teatro, al cinema, agli spettacoli, alla danza contemporanea. Frequentavo un gruppo dove mi ritrovavo con cineasti, attori e ballerini, gente di spettacolo. Lì ho scoperto la mia passione per le fotografie, quelle mie, ma soprattutto, quelle dei grandi fotografi della new York pulsante di quel periodo.
Quando sono tornata a Parigi non avevo nè un compagno, né soldi, né una casa, ho telefonato ad un amico per chiedere un lavoro, uno qualsiasi, e ho cominciato, io che sapevo battere a macchina con solo due dita, a lavorare come segretaria presso “ Vogue Hommes”, Il mio incarico era quello di correggere e poi ricopiare i testi che i giornalisti mi consegnavano su fogli stropicciati: erano scritti in un modo quasi peggiore di quello dei medici, a quel tempo non c’erano computer e da quei manoscritti illeggibili dovevo decifrare la loro scrittura. Per fortuna, io ci riuscivo, avevo un occhio allenato dalla grafologia che avevo studiato qualche tempo prima e potevo riuscire nel mio intento. Tempo dopo i miei colleghi hanno scoperto che ero fotografa e mi hanno assegnato altri incarichi, piccoli reportage presso locali notturni, serate, e lì è cominciata la mia carriera. Ad un certo punto una delle redattrici dei servizi fotografici è rimasta incinta e ho preso il suo posto. Ho cominciato a lavorare come iconografa.
Ho fatto molti libri con foto scelte da me per tematiche differenti, lavoravo scegliendo immagini per gli articoli o partivo dalle immagini da me proposte su un tema per scrivere di un autore.
Non tutti sanno cosa sia l’iconografia: è letteralmente la descrizione delle immagini, dove si cerca di identificare i soggetti delle opere d’arte e le fonti da cui esse derivano. A volte l’iconografia si occupa di riconoscere in un ritratto un determinato personaggio, altre volte si fanno interi servizi a partire da una o più foto. Io ricercavo, riunivo e scrivevo, selezionavo i servizi più adatti al giornale tra quelli che le agenzie proponevano o strutturavo io stessa un racconto fotografico, aggiornavo le mie conoscenze legali e i diritti di negoziazione, sono sempre stata attenta a difendere i fotografi, molti di essi sono diventati mei amici
Sono rimasta lì per 30 anni per diventare poi free lance per molti giornali
Una volta in pensione ho ripreso a viaggiare per tutto il mondo: Europa, Asia, America.
Uno dei paesi che più mi ha affascinato è stata l’Islanda, un paesaggio spettacolare, mi sembrava di essere su un altro pianeta.
Quando sono andata in pensione sono partita in un ashram in India dove ho cominciato a fare tardivamente yoga e incontrato gente di tutto il mondo che praticava tale disciplina. É stato qualcosa di forte impatto entrare in un’atmosfera differente, avvicinarsi alla gente senza mai conoscerla veramente dà il desiderio di conoscere sempre di più gli altri e al contempo me stessa.
Lì , mi hanno proposto di insegnare francese, non l’avevo mai fatto, ma mi hanno assegnato un gruppo di piccoli allievi, potevo insegnare la lingua liberamente, in modo non accademico , io ho utilizzato giochi, canti e disegni. Erano 9 bambini tra gli 8 e i 12 anni e quel periodo tra loro è uno dei più bei ricordi della mia vita.
Ciò che più di tutto ho amato nel corso degli anni è stato il cinema , ho l’impressione che tutta la mia evoluzione sia stata segnata da esso, quando ero piccola, mia madre lavorava e mi depositava in un cinema a Belleville dove vedevo in continuazione dei film, sono cresciuta con il cinema che mi ha accompagnato nel quotidiano, ho amato tanti registi: Antonioni, Visconti, Jean Luc Godard, Jim Jarmush, Martin Scorsese, sono stai tantissimi, non posso dire quali siano i miei preferiti senza tradire gli altri. Il mio cinema preferito è lo studio 28, a Montmartre, adesso ci vado a piedi da rue Lepic, da giovane, quando abitavo in periferia , attraversavo tutta la città per recarmi lì, proiettavano film d’autore, è un posto fantastico, ha grandi lampadari, tende rosse che si aprono all’inizio degli spettacoli, stare su una poltrona immersa nelle immagini è un’esperienza unica.
I miei progetti futuri riguardano la possibilità di viaggiare di nuovo dopo la pausa della quarantena, la cosa più importante è avere delle buone relazioni, buoni amici. voglio continuare a ricercare belle immagini,
Ora continuo il mio lavoro di iconografa su facebook dove cerco di diffondere la bellezza, l’amore per i testi e per l’immagine.
Eve Zheim